Une nouvelle culture du risque naturel d’inondations est possible
Mais le dérèglement n’est pas la seule raison de l’aggravation des dégâts et des risques. Loin de là. Des décennies d’occupation imprudente des zones inondables, d’imperméabilisation des sols, de pratiques agricoles non durables, comme l’arasement des haies, les monocultures sur de trop grandes surfaces, le drainage des zones humides, le compactage des sols suffisent en eux-mêmes à transformer un évènement pluvieux en épisode catastrophique.
Avec le dérèglement climatique, les évènements pluvieux causent des dommages de plus en plus considérables aux sociétés humaines, comme l’a par exemple montré la crue du Gier, dans la Loire, le 17 octobre 2024.
Pour limiter les dommages, il faut donc changer de cap.
La bonne nouvelle est que c’est possible, et notre pays est sur la bonne voie. Depuis la lutte de Loire Vivante, entre 1986 et 1994 contre les projets de grands barrages sur la Loire censés pouvoir « contrôler les crues », les politiques publiques de restauration des fleuves se mettent en place progressivement. Le Plan Loire Grandeur Nature, lancé par Michel Barnier en 1994 a ouverte la voie.
Aujourd’hui, il devient courant d’enlever des maisons, des entreprises trop exposées car construites dans le lit des rivières, voire de remettre à l’air libre des rivières imprudemment recouvertes par du béton à l’air libre, afin de leur redonner plus de place pour l’écoulement en crue. C’est ce que devrait faire la ville de Rive-de-Gier, dans la Loire.
L’intérêt de ces nouvelles pratiques est aussi de remettre les rivières dans l’espace public, dans nos vies, nos paysages et de permettre ainsi le retour de leur biodiversité disparue

Célébrer la restauration des rivières : les guinguettes sur le Furan à Andrézieux Bouthéon.
Les rivières, les fleuves accompagnent nos vies depuis la nuit des temps. Elles sont intimement liées à nos diverses civilisations. Elles ont favorisé l’implantation des villes, imprègnent nos arts, nos modes de vie, nos croyances. Elles nous ont aussi nourri pendant des temps immémoriaux, grâce à l’activité des pêcheurs professionnels en eau douce, une profession aujourd’hui menacée.
Nous avions oublié cela durant un XX éme siècle qui les aménagées sans ménagement.
Depuis une trentaine d’années, des efforts conséquents sont entrepris partout sur la planète pour les restaurer, les remettre au centre de nos vies. Nous pouvons retrouver certains de leurs bienfaits oubliés, apprendre à se tenir à distance de leurs terribles colères. Nous avons compris qu’elles nous aident à rafraichir les villes, qu’elles sont sources de beauté, de joies, de détente dans des espaces urbains trop minéralisés.
Des opérations comme le World Fish Migration Day rassemblent, depuis une dizaine d’années, des pêcheurs, riverains, scientifiques, entreprises, élus, associations sur les bords des rivières dans le monde entier, afin de célébrer le retour des poissons migrateurs.
Dans la Loire, à Andrézieux-Bouthéon, le Chant des Rivières a lancé en 2022 avec La Fabrique une fête annuelle pour célébrer la restauration du Furan, une rivière rudement industrialisée au fil de la glorieuse histoire de Saint Etienne. La restauration entreprise par Saint Etienne Métropole depuis les années 90 est une réussite méconnue. Pendant deux soirées en fin d’été, les riverains viennent écouter de la musique, dansent, mangent et boivent sur les bords du Furan en voie de renaturalisation.
Célébrons. Ecoutons le chant de l’eau. Contemplons la beauté des rivières.